L’intention dans le massage…. une notion fondamentale !
Au fil de cet article, Roddy nous amène à nous questionner sur les différentes facettes de l’intention : l’attention, la conscience, la présence…
Introduction au massage et introduction sur l’intention
Mon parcours dans ma formation de masseur a toujours été accompagné par une motivation : celle d’être à l’écoute du massé et de lui apporter le bien-être.
L’acte de massage est au départ la rencontre entre 2 intentions. D’une part, celle pour le massé de se trouver à l’issue de la séance dans un état de mieux être. Avant d’être un rendez-vous avec le masseur, la séance de massage est un rendez-vous avec soi-même. D’autre part, celle pour le masseur d’amener le massé vers cet état de bien-être qu’il recherche.
La réussite de l’acte du massage tient donc dans cette double intention.
L’expérience m’a montré que le résultat obtenu est bien meilleur lorsque les 2 protagonistes ont conscience de ces motivations.
C’est la raison pour laquelle il est important avant de démarrer une séance de massage d’être à l’écoute du besoin du massé, afin de comprendre son état actuel et lui proposer un cheminement qui l’accompagnera au mieux vers le bien-être recherché. Cela passe par la séance d’accueil et par le suivi du massé d’une séance à l’autre : qu’est-ce qui a été positif, qu’est-ce qui l’a moins été, quelle a été l’évolution entre 2 séances ?
Cette étape n’a pas comme unique but d’apporter au masseur les informations pour qu’il oriente au mieux sa séance de massage, mais également de permettre au massé de prendre conscience par lui-même des besoins que son corps exprime, et qui l’ont amené là.
En effet, le simple fait de prendre un rendez-vous avec un masseur relève d’une 1ère étape dans le processus de l’intention dans le massage. La personne massée prend conscience du besoin d’agir pour se sentir mieux. Elle entre dès la prise de rendez-vous dans une intention de faire évoluer son état dans le mieux-être.
C’est une étape qui peut paraître anodine, mais c’est une étape fondamentale pour la réussite de l’acte de massage. Le massé rentre dans un processus qui l’amène progressivement dans un état de détente, de lâcher prise qui permettront de tirer les meilleurs bénéfices du massage. Bien entendu, nous ne présentons pas tous le même état de détente avant de démarrer des séances de massage. L’intensité de l’intention du massé varie d’une personne à l’autre. Certaines personnes auront une certaine pudeur, un réflexe de protection de soi, qu’il soit physique par le toucher du corps ou émotionnel car les tensions qu’expriment notre corps sont bien souvent le reflet d’un stress émotionnel. Lorsque le massé est à l’origine de la démarche, le fait de prendre contact avec un masseur est le témoignage de la prise de conscience qu’il est nécessaire d’agir pour aller mieux.
A cette étape, le rôle du masseur est d’accueillir cette démarche avec bienveillance. Il s’agit d’être à l’écoute de la personne qui se présente à nous, et de comprendre ce besoin d’améliorer son état physique et émotionnel.
Cette écoute avant le massage a pour objectif d’amener le massé vers la détente et le rassurer psychologiquement. Le masseur accueille le besoin, et même s’il n’en comprend pas tous les contours, sa démarche a pour objectif de mieux comprendre, et d’essayer d’y répondre du mieux qu’il le peut avec les outils dont il dispose.
Cette notion d’écoute va s’étendre tout au long du massage. Il n’est pas anodin que l’étymologie du mot « intention » le relie au mot « entendre ».
Il s’agira d’être à l’écoute tout au long du massage, à l’écoute de la respiration, à l’écoute de la réaction du corps, des tensions, de l’expression et la détente du visage, de la position du corps sur la table de massage, à l’apprentissage de la détente des muscles, étirements, mobilisations, etc …
Le masseur n’est pas thérapeute, il n’a pas vocation à soigner le massé à la fin de la séance ou d’une série de séances, mais son action a pour objectif de faire tendre le massé vers un état de mieux-être.
A ce titre, on peut noter qu’une autre étymologie de « l’intention » la relie à l’action « tendre ».
Mon esprit scientifique donnerait la définition suivante à l’action « tendre » : appliquer progressivement une force à un objet dans une direction donnée, ayant pour conséquence d’en changer l’état et de l’orienter selon la direction souhaitée. C’est bien là l’action du masseur : avec application, le massage a pour objectif d’amener le massé vers l’état de bien-être. La notion de progressivité a elle aussi son importance. Il ne s’agit pas de tirer le massé, mais de l’accompagner de façon progressive, le temps de la séance, mais également à l’échelle de plusieurs rendez-vous.
On pourrait également faire le parallèle avec les fonctions asymptotiques, ces fonctions qui partent d’une valeur et qui dans le langage mathématique « tendent » de façon progressive vers une autre valeur.
On pourrait poursuivre ce type de parallèles, mais le propos ici est de montrer le caractère fondamental de l’intention dans le massage, car cette notion est selon moi une des essences même du massage bioénergétique : le massage est intention, et l’intention nourrit le massage. Mais alors, comment est-ce que cela se manifeste au cours du massage ?
La manifestation de l’intention au cours d’une séance
Avant, le massage, il me parait essentiel de laisser un temps au massé seul allongé sur le support de massage avec un fond sonore apaisant. C’est une façon de laisser le massé prendre conscience de sa propre intention. C’est une 1ère étape vers le lâcher prise. Le massé prend conscience que s’il est là, à cet endroit, c’est par sa propre volonté, c’est parce qu’il a cette volonté de se relaxer, de se faire du bien. Il se crée sa propre sphère de bien-être et attend d’être accompagné par le masseur vers cet état vers lequel il tend à se retrouver. Il est à noter que bien souvent, cet état n’est pas et n’a pas vocation à être défini. On s’oriente vers le mieux-être, et lorsque l’on est allongé sur le support de massage, comme lorsque l’on suit son premier stage d’initiation au massage, on est déjà dans la bonne direction.
Cette étape est aussi pour le masseur une étape qui lui permet de de se recentrer sur l’acte de massage, de canaliser son énergie vers cette intention d’apporter le bien-être au massé.
Le processus d’écoute se poursuit à cette étape. Il s’agit d’observer comment le corps du massé se présente au masseur, d’observer la respiration, et entrer en connexion avec l’autre au travers de l’intention qui s’apprête à être donnée.
La prise de contact, est une étape du massage que j’ai découverte au moment où j’ai démarré ma formation de masseur. Avant cela, rares étaient les instituts de massage qui m’avait proposé cette étape en tant que massé.
Pourtant, c’est aussi une étape essentielle car elle établit le premier contact physique avec le massé.
Par son approche, la prise de contact signifie au massé que le masseur sera à l’écoute de son corps, et le sondage commence par cette première connexion.
C’est une étape qui mérite une grande attention car c’est un signal qui donne l’orientation que va donner le masseur au cours de son acte. L’intention ne sera pas de masser pour masser physiquement. Le massage se fera avec conscience.
Il s’agit dans un 1er temps d’écouter le corps, de l’amener vers le lâcher prise, qui permettra une meilleure compréhension de ce que le masseur observera au cours du massage de façon à apporter la réponse la plus adéquate au besoin. En ce sens, la simple apposition des mains sur le corps du massé en écoutant sa respiration est la 1ère manifestation de l’intention du masseur. C’est d’autant plus vrai quand on veut se former au massage des bébés, pour qui cette écoute est le seul canal de communication avec le praticien.
La prise de contact, poursuit cette dynamique : par les polarisations, les pressions, le masseur indique qu’il prend le pouls du corps et que son massage se construit selon une approche qui se veut globale et progressive qui nécessite cette phase de préparation attentive.
Avant ma formation de masseur, j’avais pu constater que l’intention que je mettais dans la recherche du lâcher prise et dans mes massages était un élément-clé dans la satisfaction de la personne massée.
J’étais surpris du résultat bien que je ne disposais alors que de peu de technique. Je faisais un peu, « n’importe quoi », au sens technique, mais l’intention était là.
La formation a grandement élargi mon éventail technique mais par-dessus tout elle m’a permis de comprendre que je pouvais mettre l’ensemble des techniques apprises au service de mon intention.
A ce titre, les polarisations, le travail sur les fascias, le massage du ventre, m’ont permis de comprendre qu’un toucher léger mais nourrit d’intention pouvait me permettre d’être davantage à l’écoute du corps de la personne massée, mais aussi à l’écoute de mon propre ressenti en tant que masseur.
J’ai pu constater les bienfaits de ce type de toucher lorsque je les ai reçus et sur les retours que j’ai eu lorsque j’ai expérimenté ces techniques.
J’ai toujours été défini (et je me définis moi-même) par ma formation scolaire et professionnelle comme quelqu’un de scientifique.
Pourtant, j’ai toujours ressenti une connexion à l’autre et un besoin d’apporter à autrui quelque chose autre qu’un échange matériel. C’est ce qui je pense m’a amené naturellement vers le massage.
Même si je reste quelqu’un de plutôt terre à terre, et que les notions de chakras ou d’énergies restent des notions qu’il m’est difficile d’appréhender, il est clair que les expériences lors du stage de réflexologie et les séances d’éveil corporel (entre autres) m’ont permis d’établir une connexion telle que j’ai ressenti des énergies qui sont bien différentes de celles que j’ai étudié au cours de ma formation scientifique, parfois via un contact très léger, voire sans même toucher la personne. Ces expériences m’ont convaincues dans le pouvoir de l’intention.
Même si je n’ai pas la prétention de maîtriser à la perfection les différents techniques que j’ai apprises, je garde la conviction que l’intention, cette volonté de « tendre vers » un objectif, permet a minima de s’en approcher.
A titre d’exemple, les notions de bases apprises en réflexologie ne feront pas de moi un réflexologue plantaire, mais lorsque j’exerce des techniques de réflexologie, je le fais avec l’intention de « contacter » les organes correspondant aux zones des pieds qui leur sont associées telles que je les ai apprises, et avec l’intention de soulager ou de faire circuler de l’énergie positive dans ces zones. Je ne dispose pas de moyens physiques qui me permettraient de mesurer s’il se passe, bien ce que j’ai l’intention de faire. Cependant, je peux constater que cette pratique est appréciée par les personnes que je masse et que cette attention participe à la démarche vers le mieux-être.
L’intention permet au masseur de se connecter, et de rester connecter à l’autre. Elle implique une présence dans le massage qui participe grandement à la qualité du massage. Elle guide le schéma du massage, permet au masseur de se recentrer sur son expérience instantanée, et efface peu à peu la notion de protocole.
L’intention du masseur vers le masseur
L’intention que donne le masseur n’est pas dirigée uniquement vers le bien-être du massé.
J’ai pu constater par ma propre expérience que l’acte de massage peut amener le masseur vers un sentiment de bien-être, et c’est aussi un élément qui sera recherché par lui, et récompensé par une séance qui aura porté ses fruits.
Pourtant, plusieurs difficultés peuvent survenir, et il appartient au masseur de garder à l’esprit que son intention doit aussi être portée sur lui-même.
La connexion à l’autre au cours d’une séance de massage peut être très intense et « dépasser » le masseur. Le risque que j’y vois, c’est que cette connexion qui s’est établie sous l’impulsion de l’intention peut elle-même aller à l’encontre de l’intention de départ.
En d’autres termes, de façon contre-intuitive, en voulant être trop présent, on peut finir par partir un peu trop loin …
Il est nécessaire pour le masseur de ne pas perdre de vue son objectif.
Cela passe par la prise de conscience par le masseur que pour aller vers son objectif, il doit rester centré sur sa propre expérience en tant que masseur pour ne pas partir dans tous les sens.
Il est également important de se dire que pour apporter du bien à l’autre, il ne faut pas le faire au détriment de son propre bien être. Quand des énergies négatives sont ressenties, on peut chercher à les évacuer mais il n’est pas question de les absorber. Lorsque ces énergies sont trop fortes, il faut garder à l’esprit que l’objectif est de « tendre vers ». Peut-être que certains problèmes devront être gérés en plusieurs séances. Peut-être aussi qu’il faudra en discuter avec le massé en fin de séance (« j’ai senti quelques tensions très fortes, nous allons y travailler, mais cela va nécessiter une approche en plusieurs étapes … »).
En ce sens, l’intention du masseur doit être également mise au service de son propre bien-être.
La concentration dans l’exercice de massage ne doit pas amener à une sorte de crispation. Au contraire, il faut chercher à s’ouvrir au maximum, et laisser l’écoute et l’attention suivre un cheminement libre. Je n’en suis pas encore pleinement à ce stade, mais je me suis rendu compte que c’est la multiplication des pratiques, l’assimilation au fur et à mesure des différentes techniques, et le développement de la capacité d’écoute qui amènent petit à petit ma pratique à devenir plus fluide.
Il est nécessaire que le masseur adopte des postures qui lui permettent de masser sans se faire physiquement mal. De même, il sera important de bien respirer comme pour n’importe quelle activité physique.
Cette attention qu’on dirige vers nous même en tant que masseurs sera bénéfique pour le massé, car en étant mieux ancré dans son corps les gestes sont plus précis, et la présence dans le massage est mieux ressentie.
Dans l’intention que porte le masseur sur sa propre activité, il est important qu’il garde toujours à l’esprit de le faire en conscience. Il doit mettre de la conscience dans tout ce qu’il fait, et ne pas perdre le fil. Si les mouvements sont trop « mécaniques », le masseur perdra le ressenti et l’écoute nécessaire au bien-être.
L’intention et le ressenti
Il me semble approprié de dresser un pont entre l’intention et le ressenti.
Comme on l’a vu, au fur et à mesure des expériences de massage, les différentes techniques dont on dispose viennent se mettre au service de l’intention. Mais cela suit un cheminement qui passe par le ressenti.
En effet, c’est l’application dans le massage qui fait qu’on va mieux ressentir l’état du massé, ou au cours du massage, des changements d’état.
Les zones de tension ou les relâchements peuvent être difficilement perceptible, mais c’est justement l’intention qui va aider à les percevoir.
Ce qu’il est intéressant de constater, c’est que lorsqu’on cherche des zones de tensions spécifiquement, il est difficile de bien les percevoir, alors que dans une approche globale et progressive, on finit par mieux ressentir le corps du massé.
C’est pourquoi à mon sens l’intention et le ressenti sont indissociables dans une séance de massage. Si on a l’intention de relâcher une zone tendue, mais qu’on ne cherche pas à la ressentir, l’effet désiré ne va pas forcément être obtenu. De même, si on cherche à ressentir à tout prix, sans y mettre d’intention, alors on risque de ne pas de comprendre ce qui se passe sous nos mains.
Le ressenti est également un guide pour l’intention : suivant ce que l’on ressent, on va porter son intention sur une zone particulière et on va utiliser les techniques qu’on juge les mieux appropriées. On peut alors au début d’un massage avoir un protocole en tête, et partir sur complètement autre chose.
Conclusion
L’intention a toujours été un élément que j’ai intégré dans mes massages, et j’ai trouvé cette caractéristique chez tous les masseurs et apprentis-masseurs que j’ai rencontré au cours de ma formation.
Ce que j’ai pu constater, c’est que ma formation a eu tendance à développer cet élément essentiel.
Au-delà des techniques de massage, nous avons appris à développer cette notion d’intention. De fait les gestes se veulent plus précis, leurs enchainements suivent une logique, on ose s’attarder davantage sur une zone du corps par simple apposition des mains, on se donne le temps de ressentir avant d’agir.
L’intention se porte à la fois sur le massé, mais aussi sur le masseur. Pour atteindre ces objectifs, le masseur doit être à l’écoute de l’autre, mais aussi à l’écoute de son propre corps. Il doit rester en pleine conscience de l’exécution de son massage pour pleinement ressentir, adopter les postures adéquates à son bien-être pour pouvoir délivrer le massage en fluidité, avec les niveaux de pression appropriés et sans contrainte.
Même en-dehors du massage, le pouvoir de l’intention crée des miracles. J’ai à l’esprit l’expérience de mon frère, sportif de haut niveau, dont les meilleures performances sont arrivées lors des compétitions (et non en entraînement) : c’est son intention qui lui a permis de se dépasser dans ces moments. Que ce soit dans le cas de ma sœur, danseuse professionnelle, ou de mes frères, leur réussite doit beaucoup à ce pouvoir de l’intention.
Pour rester dans le domaine du massage, je vois l’intention comme le moteur du masseur. L’intention du masseur doit lui permettre, d’un massage à l’autre, de se poser les bonnes questions pour améliorer sa pratique. C’est cette intention qui va le pousser à progresser dans sa pratique, à améliorer sa capacité d’écoute essentielle au masseur, à chercher de nouvelles techniques de massage, à échanger avec l’entourage, masseurs, massés, pour identifier qu’est-ce qui est bien, qu’est-ce qui l’est moins.
Mais par-dessus tout, c’est cette intention, qui fait qu’une main sur une épaule peut être ressentie différemment suivant l’intention qui y ai donnée, qui joue aussi grandement sur la qualité d’un massage.