Les peurs, le besoin de sécurité, l’autonomie…

Mieux comprendre nos mécanismes individuels et collectifs

Dans une période où notre vie sociale met en relief un besoin de sécurité sans cesse croissant, reflet d’une peur de la mort omniprésente, est-il possible de nourrir une forme de sérénité intérieure ? Comment faire peser moins d’attentes sur le collectif pour retrouver une forme d’autonomie, base de rapports humains basés sur l’échange et l’épanouissement plutôt que sur la peur ?

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Je dis quelques mots sur la notion de sécurité et le besoin de sécurité.

C’est quelque chose auquel on est constamment confronté en tant que praticien en Qigong Tuina, ou en médecine chinoise, enfin dés qu’on est au contact de gens, on est très souvent confrontés à ça.

Et dans la vie sociale et politique actuelle c’est un point qui est extrêmement important, ça prend énormément de place. Ce besoin de sécurité il a une racine qui est très profonde : c’est la peur.

Et la peur qui est la plus primordiale chez l’être humain c’est la peur de mourir, ou la peur de disparaître. C’est la mère de toutes les autres peurs. Il y a d’autres peurs : la peur de la maladie, la peur de la pauvreté, la peur de la honte, etc, mais derrière tout ça, il y a la peur de la mort.
Cette peur de la mort c’est quelque chose qu’on porte tous en nous : à partir du moment où on est vivant, on sait qu’on va mourir, mais on essaye de ne pas trop y penser parce que ça nous fait relativement peur.

Donc on est confrontés à ça. Pour essayer d’éviter de s’y confronter, on peut avoir envie de déléguer cette peur ou de reporter cette responsabilité, cette peur, sur l’extérieur. Et ça, c’est un recherche qui est très présente dans notre société. C’est le fait d’essayer de rendre des choses extérieures, responsables de notre vie.

C’est-à-dire que plutôt que d’être responsables de notre vie ou de notre survie, on se dit : « c’est la police qui nous protège », « c’est les médecins qui nous soignent », ou « c’est l’urbanisme qui décide où est-ce qu’on construit notre maison », etc.

Donc on se décharge de notre responsabilité intérieure, profonde, sur le collectif. Et ça, ça a une limite parce que cette peur elle va toujours être quelque part au fond de nous, et d’un certain point de vue on sait très bien que par exemple la police ne peut pas nous protéger de tout, les médecins ne peuvent pas nous protéger de tout, etc. Mais cette peur elle est tellement forte qu’elle légitime beaucoup de choses. C’est-à-dire qu’une fois qu’on a vraiment très peur de mourir, on est prêt à accepter absolument tout.
Parce que ça nous évite de nous confronter à cette peur. Donc notre société elle fonctionne beaucoup comme ça, et ce qui intéressant c’est juste de l’observer, et se demander comment on peut changer un tout petit peu notre regard.

Ce n’est pas de remettre en question le fonctionnement de la société, mais c’est de changer notre regard pour peut-être se responsabiliser un tout petit peu plus, de soi-même.

Par exemple des gens qui pratiquent les arts martiaux, souvent ils disent ça, que ça leur donne plus confiance en eux. En vérité on sait très bien que même si on est un pratiquant d’arts martiaux aguerri, si on se fait attaquer par une bande de personnes sur-armées, il y a toutes les chances qu’on y passe, il n’y a pas l’illusion que l’on va se protéger vraiment soi-même.
Mais le fait de pratiquer les arts martiaux, on est responsabilisé de soi-même. Et ça nous donne confiance en nous.

De la même façon, de pratiquer des choses comme le Qigong, les automassages etc, ça va nous auto-responsabiliser de notre santé. Par exemple dans la pensée chinoise il y a un concept fondamental c’est la notion de prévention : c’est l’idée qu’on est à l’écoute de soi-même et que quand il y a un déséquilibre on va essayer de le rééquilibrer. Par exemple dans le Qigong Tuina ça va être à travers des méthodes d’automassage ou des méthodes de Qigong.

Dans les livres que j’ai écrit il y a plein de méthodes comme ça. Par exemple j’ai un peu mal au ventre, je peux faire une méthode de déblocage du méridien de l’estomac, de cette façon, pour favoriser la digestion. Ce sont des choses extrêmement simples mais qui ont le grand mérite de se responsabiliser un peu plus de soi-même.

C’est pas pour remplacer une visite chez le médecin, mais c’est en complément, pour se dire : je peux aussi faire quelque chose pour moi. Et ça, ça donne énormément confiance.

Évidemment que pour certaines choses on ne pourra peut-être pas se soigner tout seul, et ce sera de toute façon nécessaire de voir un médecin : si je m’entaille avec un couteau par exemple, je vais aux urgences, il n’y a pas de  questions là-dessus, c’est une évidence. Mais il n’empêche que le fait de m’occuper de mon corps, de ma santé au quotidien, ça me donne beaucoup de confiance.

Cette confiance elle enlève des peurs et ça met moins de poids sur le collectif. C’est-à-dire qu’on va moins attendre du collectif. Quand je dis « le collectif » je parle de la société, l’armée, la police, les hôpitaux, l’école, etc. Tout ça est important mais si on dépend de ça, on est toujours dans un état de terreur intérieure.

Parce qu’on se dit : qu’est ce qui se passe si la police ne vient pas ? Qu’est ce qui se passe si maman ne vient pas, alors que j’appelle et que j’ai faim ? Ces peurs elles sont fortes, elles sont profondes, elles viennent de la petite enfance : en effet quand on a quelques mois, si on n’est pas nourri en permanence, on va mourir très rapidement.

Mais petit à petit dans le processus de croissance, de maturité, on va vers le fait de traiter nous-mêmes ces peurs. Traiter nous-mêmes ces peurs, ça ne veut pas dire ne pas avoir besoin des autres, parce qu’on a vraiment besoin les uns des autres, il y a très peu de gens qui sont capables à la fois de s’alimenter, de se soigner, de se défendre, etc. On a besoin les uns des autres mais on a besoin aussi de sécurité intérieure, on a besoin de s’offrir notre propre sécurité. Au moins psychologiquement.
Si on ne s’offre pas notre propre sécurité on dépend trop du collectif, et on est toujours dans un état de terreur. Et quand on est dans un état de terreur, on peut faire absolument n’importe quoi.

À partir du moment où on nous dit : « je te protège si tu fais ça », si on a suffisamment peur de mourir, on fait tout ce qu’on nous dit. Donc entretenir la sécurité intérieure ça permet d’avoir un peu plus de recul et de participer de façon plus efficace à une vie sociale collective.

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